« Tu n'as absolument rien à me dire ! Fous moi la paix ! ». Sous la colère, je ne me contrôle plus. Voilà seize années que je me tais, que je ne dis rien et que je subis, seize années pendant lesquelles j'ai voulu prouver à mes parents que je suis une personne et non pas un objet là uniquement pour les aider à avoir encore plus de blé et de renommer. Mais j'ai bien vite compris que ça serait comme ça. Cela fait un peu plus d'un an déjà, qu'ils décident pour moi de qui je dois fréquenter, c'est ridicule. Et moi, je n'en peux plus. Du coup, après un énième nom, j'ai fui dans ma chambre. Mais ma mère ne semble pas en avoir fini avec moi.
« Mais on pense à toi ma chérie ! On veut juste te faire comprendre que c'est ce qu'il y a de mieux pour toi ! ». Je lève alors les yeux au ciel, j'étouffe dans cette famille, et ça fait longtemps. Il y a une décision qui me trotte en tête depuis déjà une éternité. Je me rends compte que je n'ai pas d'autres solutions et que c'est maintenant ou jamais.
« Tu t'en moques de ce que je veux ! ». Je hurle, en larmes, alors que je claque furieusement la porte de ma chambre. Je refuse de devoir les suivre dans tout ce qu'ils me disent. Ils estiment avoir tous les droits, juste parce que ma sœur a fermé ma gueule et a fait ce qu'ils ont voulu qu'elle fasse. Elle a épousé un bon parti. Le plus drôle, c'est que c'est ce qu'elle voulait, surtout, c'est ça qui me fout la rage surtout. Elle n'a aucun cerveau.
De rage, j'attrape ma valise, au fond de mon placard, je refuse de rester ici plus longtemps, je ne veux plus avoir à entendre ce foutu discours. J'en ai marre d'entendre dire que je rate ma vie, que mes décisions sont toujours mauvaises que je fais connerie sur connerie. J'en ai assez, j'ai juste envie de creuser un trou et de m'y terrer maintenant.. Je n'en peux plus quoi, mais ça, les gens ne semblent pas être en mesure de le comprendre, c'est ça le plus pathétique. On imagine, souvent, que parce que j'ai de l'argent et que je fais -soi disant- ce que je veux, forcément je suis heureuse. Non, ce n'est pas comme ça que ça marche. Et je donnerais tout mon argent, jusqu'au moindre centime, si cela me permet de mener une vie normal. J'ai envie de hurler, tandis que ma mère continue de frapper à la porte, que j'ai sans doute fermé au bon moment. J'en peux plus, qu'elle arrête.
« Laisse moi tranquille ! ». Mais elle n' m'écoute pas, elle continue de frapper, encore et encore, et moi, j'ai uniquement envie de rester seule. J'ai envie de partir. Mais je sais que ça ne sera pas pour ce soir. Qu'est-ce que je pourrais bien faire hein ? Je n'ai que seize ans, qu'est-ce que je pourrais bien faire hein ? Abandonnée, seule et tout ça ? Rien. Et c'est justement pour cette raison que je vais devoir attendre..
J'ai fini par partir, je ne pouvais clairement pas rester sous le même toit qu'eux, je n'en avais pas la force. J'ai tout quitté, je n'en pouvais plus. J'ai quitté ms études, et j'ai pris la route, je refusais de continuer à me taper tout ce qu'ils inventaient pour que je mène la vie qu'ils voulaient. J'estimais qu'il en était juste hors de question oui, c'est ainsi, en faite. J'ai pris mes affaires, lorsque j'ai eu dix-huit ans, j'avais économisé de l'argent (facile, puisque mes parents sont blindés ahah..) et j'ai pris la fuite. Je savais que mon compte serait bloqué, je savais qu'ils ne me laisseraient pas faire ce que je voulais. Du coup, j'ai appris à tout garder en liquide et une fois que j'ai eu une somme suffisamment conséquente pour me trouver un toit, je suis partie. Je voulais avoir mon chez moi, et surtout, je voulais recommencer ma vie, je ne voulais pas continuer sur cette voie, je ne voulais pas qu'ils dirigent ma vie, encore longtemps. Je n'en pouvais plus, après tout. Comment aurais-je bien pu vouloir mener une vie comme celle-là ? Je n'avais pas le choix de ce que je faisais, à chaque instant, je ne pouvais pas choisir la moindre de mes actions et c'était.. C'était horrible. Ne pas être en mesure de diriger sa propre vie, comment pourrait-on vivre avec ça.
Je suis partie, du moins.. Réellement partie, le jour où j'ai trouvé un appartement. Je ne voulais pas finir à la rue, ça leurs aurait prouvé qu'ils avaient raison ou ce genre de chose. Je ne voulais pas qu'ils pensent que sans eux, je n'étais pas capable de me débrouiller. Et une fois que j'ai eu un toit, un appartement pas forcément très grand, pas forcément très propre, je suis partie, je n'ai même pas dit au revoir. Je voulais fuir, et à mes yeux, c'est tout ce qui importait. Je me suis contentée de laisser un mot, quelques lettres sur un bout de papier. « Ne me cherchez pas je vais bien, je vais mener ma propre vie maintenant ». Je n'ai même pas signé. Et une fois mes affaires dans la voiture, j'ai fui vers un autre monde. Il était hors de question pour moi de rester là, dans ce monde qui n'était pas fait pour moi. Je voulais prendre mes décision, mener la vie que je voulait. Et c'était le seul moyen que j'avais pour le faire, en fin de compte.
Quand je fus vraiment bien installée, c'est là que j'ai vraiment réfléchi à ce que je voulais faire. Arrêter mes études avait surtout été une décision précipitée et sur le coup, je m'en suis vraiment voulue. Mais quand j'ai vraiment songé à ce que je voulais faire de ma vie, j'ai réalisé que le droit n'était pas pour moi. Et je me suis dit que tant qu'à vivre la vie dont je rêvais, ou en tout cas, tant qu'à vivre selon mon envie, je n'avais qu'à vivre tout ça jusqu'au bout. J'ai vraiment réalisé que je n'avais qu'une seule vie et que je ne pouvais pas attendre des siècles comme ça. Je serais passée pour une imbécile oui, c'est parfaitement aussi simple que ça en faite, quand on y repense.
La peinture a toujours réellement été importante pour moi. Ca n'a jamais été facile d'assumer ses envie d'artiste, auprès d'une famille faible d'esprit qui vous voit avocat ou médecin. Du coup, j'ai toujours fait ça en cachette. Je me planquais pour dessiner, pour peindre.. Ma mère refusait de m'acheter des pinceaux, de la peinture, ils trouvaient toujours que c'était du temps perdu. Mais maintenant que j'étais seule.. Tout devenait plus simple. J'ai donc dépensé mon argent pour ça, j'ai donc dépensé ce qu'il me restait pour acheter du matériel. Et j'en avais besoin, oui, c'était aussi simple que ça, de toute manière. Mais ça m'allait très bien, en fin de compte et il n'y avait rien d'autre à en dire. Dans un sens, du moins. Quoique je puisse en dire, les choses ne sont jamais comme on aimerait qu'elles le soient. Changer de vie, partir et quitter sa famille, pour vivre la vie que l'on veut, non, ce n'est pas facile, et c'est bien ça qui est énervant, ça qui est chiant. Mais proclamer être peintre ne fait pas de nous un artiste et ne nous amène jamais de l'argent, sans s'en donner la peine.
Ma route a définitivement pris un tournant quand j'ai rencontré Sally. Elle m'a aidée, m'a permis de travailler dans son restaurant, quelques temps. Parce que certes, j'avais pris de l'argent à mes parents, mais pour pouvoir avoir un appartement, des meubles et des fournitures pour peindre, il en faut. Et du coup, ça c'est vite envolé et il m'a fallu du pognon. J'ai rencontré Sally dans un bar, par pur hasard, j'avais besoin de décompresser, je venais de me rendre compte que je n'allais pouvoir payer qu'un seul dernier loyer et je n'étais absolument pas prête pour le quitter déjà. J'avais envie de garder cette vie, j'en avais besoin en réalité, je ne voulais pas partir, comme ça, il en était hors de question même, si on veut tout savoir. Et je ne sais plus comment j'en suis venue à lui parler de tout ça. Et d'un naturel hors du commun, elle m'a dit qu'elle pouvait m'aider, qu'elle avait besoin d'une serveuse et qu'elle me donnait une chance. Mais ce n'est pas le fait qu'elle me donne un emploi qui a changé ma vie, même si ça m'a aidé bien sûr.
Nous sommes, avec le temps, devenues des amies très proches, on comptait l'une sur l'autre, et elle savait tout de moi. Ca fait bizarre de réussir à se confier comme ça avec quelqu'un, pour autant, je ne dis pas que cela ne me fait pas plaisir. Dans une situation comme la mienne, on a besoin de se confier, besoin de parler à quelqu'un et Sally est venue à moi comme ça. Une amie proche, une amie sincère, quelqu'un sur qui je pouvais compter, c'était un fait. Pourtant, les choses n'ont pas été si simples que ça, et c'est bien ça qui se trouve être le problème. Quoi que l'on en dise, de toute évidence. Et un jour, alors qu'on discutait bêtement et que je lui disais que je rêvais de travailler dans la peinture, elle a illuminé ma vie. Oui, tout ça.
« Mon restaurant est plutôt bien fréquenté.. Ca ne te branche pas d'y peindre un truc ? J'ai toujours trouvé mes mur trop vide ! ». Je ne savais plus où me mettre, j'avais surtout l'impression, au début, qu'elle plaisantait, elle ne pouvait pas me dire un truc pareil, dans ma tête, c'était impossible quoi. Et pourtant, quelques semaines plus tard, je finissais la peinture de son restaurant. J'ai eu bon nombre d'éloges, beaucoup de personnes se sont mise à me dire que j'étais douée. Je ne savais surtout plus où me mettre moi, c'était abusé. Et.. Et au final, j'ai fini par me creuser un petit trou dans le monde de l'art. J'ai fini par vendre des peintures, et j'ai arrêté de travailler dans le restaurant.
Sally a bel et bien changé ma vie, et ça fait vraiment bizarre hein, c'est vraiment le genre de chose que je ne croyais pas, mais oui, j'en avais besoin, et ça m'a vraiment fait plaisir, j'en avais besoin, voilà tout. Et ça m'a fait du bien, de voir que peu importe de quel milieu on vient, on trouve toujours des gens avec qui passer du temps et surtout sur qui on peut compter. Surtout ça..
Le jour où j'ai rencontré son café marque le début de ma chute. Oui c'est fort et ce n'est sans doute pas la façon la plus évident d'aborder le sujet. Surtout que la première impression qu'il m'a donné, c'était celle d'un homme charmant, doux, tendre.. Et canon. Ouais voilà. Je me foutais bien du café qui salissait ses fringues, moi je le trouvais beau. Et c'était la seule chose qui était vraiment importante. Même si ce n'était probablement pas la chose la plus importante, c'est un fait. Et c'est comme ça que ça marche, de toute façon. Bien sûr que je n'allais pas le laisser dans cet état, je ne l'aurais pas laissé dans cet état en plus. Je ne suis pas toujours facile à vivre mais je ne dis pas non plus que je suis une garce. Je l'ai ramenée chez moi. Voici la grosse erreur. J'aurais dû le laisser dans sa merde, j'aurais dû le laisser avec son café. Quand j'ai balancé sa chemise dans mon lave-linge et que je me suis retournée vers lui. Je ne sais pas ce qui m'a pris. En réalité, ce qu'il s'est passé, ça n'a jamais été comme ça pour moi, je n'ai jamais agi de cette manière. Mais voilà. Je l'ai regardé de haut en bas, je le déshabillai du regard, c'est ça qui est dingue, en fin de compte.
Et bien sûr, on a couché ensemble.
C'est après que j'ai vraiment réalisé que j'avais fait une connerie. Il portait une chevalière. Comme celle que mon père porte. Il était un fils de riche, le genre de personne que je voulais repousser, le genre de personne que je ne voulais juste pas dans ma vie. Je le lui ai fait comprendre d'ailleurs. Mais je ne l'ai pas mis dehors, je ne l'ai pas foutu à la porte parce que j'aimais ses lèvres, ses mains, ses caresses.. C'est con, il était tout ce que je détestais chez un homme et pourtant, je voulais en savoir plus sur lui, pourtant, je voulais en apprendre plus et je voulais même tout savoir. C'est con bordel, tellement con que ouais, j'étouffe presque. C'est bizarre. Ce mec.. M'a changé
Il a tout bousculé en moi
Il s'est pointé chez mes parents un jour. Ma mère m'a téléphoné (je ne lui avais pas parlé depuis une éternité), elle m'a dit que mon petit ami était chez elle, qu'il était charmant. Je n'ai pas compris sur le coup mais je n'ai pas tarder à comprendre. J'ai foncé chez mes parents et mon regard s'est posé sur lui. Directement je l'ai pris à part et on a parlé. Mes parents pensent que nous sommes ensemble. Moi même je n'y comprends rien. Ce qu'il y a entre lui et moi est flou.
Je déteste qu'il aille voir mes parents, je déteste qu'il joue avec moi et qu'il soit riche. Mais je suis tombée amoureuse de lui, bien malgré moi. Je n'y comprends rien mais cela me touche, bien malgré moi. Mais je ne dirais rien, il en est hors de question. Il ne saura pas parce que je ne veux pas être faible, et je ne veux pas qu'il ait quelque chose pour se moquer de moi. Bordel, je refuse de dire quoi que se soit. Il n'a qu'à le dire lui ! Mais il ne m'aime sans doute pas. Nous ne sortons pas ensemble, même si c'est ce que croient mes parents. Je l'aime, oui, c'est vrai, mais je ne lui dis pas et je lui fais croire que c'est tout le contraire. On s'embrasse, on se touche, mais on s'éloigne juste après. Je ne ferais pas le premier pas... Et lui ?
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